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Page:Scarron - Le Virgile travesti, 1889.djvu/145

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Si les Troyens brûlaient leurs morts,
Au lieu d’en enterrer les corps,
Le poète ici s’entretaille,
Mais, ô bon lecteur ! tout coup vaille,
Il importe peu que Scarron
Altère quelquefois Maron.)
Revenons à messire Anchise :
"Quand on a la perruque grise,
Ajouta-t-il, on ne doit pas
Redouter beaucoup le trépas.
Vieil, cassé, malpropre à la guerre,
Je ne sers de rien sur la terre :
Spectre qui n’ai plus que la voix,
J’y suis un inutile poids,
Depuis le temps que de son foudre
Jupin me voulut mettre en poudre,
Depuis le temps qu’il m’effraya,
Ce grand Dieu, qui me giboya
Par une vengeance secrète ;
Mais je suis personne discrète,
Je n’en dirai point le sujet :
Suffit que j’aurais eu mon fait,
Sans Vénus, qui sauva ma vie.
J’ai depuis eu cent fois envie
De m’aller pendre un beau matin,
Et finir mon chien de destin.
Laissez-moi donc mourir à l’aise,
Et, si l’on m’aime, qu’on se taise."
Voilà ce qu’il dit obstiné,
Dont je fus plus que forcené.
Ma chère Créuse le prie,
Mon fils Iulus pleure et crie ;
Mais c’était, tant il était dur,
Se donner du front contre un mur.
"Ah ! ma foi, monsieur mon beau-père,
Lui dit notre femme en colère,
Vous viendrez ou direz pourquoi :
Vous faites bien du quant-à-moi."
Autant lui dit le jeune Iule
Mon père, opiniâtre en mule,