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Page:Scarron - Le Virgile travesti, 1889.djvu/232

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Ne songe plus à s’exercer
Et ne fait que son temps passer.
Tout mange, boit, rit, danse et raille ;
Au diable si pas un travaille !
Tous les ouvrages commencés
Par les ouvriers sont laissés :
Les tours demeurent imparfaites,
Les murailles ont des lunettes ;
Tous les desseins vont à vau-l’eau,
Ce qu’on ne trouve bon ni beau ;
Tout le monde en dit des sornettes,
On en fait mille chansonnettes :
Autant en emporte le vent ;
On ne fait pas mieux que devant.
Junon, de colère enflammée
De voir perdre sa renommée
Et mettre tout à l’abandon
La Sidonienne Didon,
Cette dame qui toujours gronde,
Alla trouver Vénus la blonde,
Et d’un visage renfrogné :
"Vous croyez avoir tout gagné,
Lui dit-elle, dame Cythère ;
Par votre infâme ministère,
Et de Cupidon, votre enfant,
Qui tranche du dieu triomphant,
Et qui pourtant pour tout potage
N’est que dieu du maquerellage.
Vraiment vos deux divinités
Ont de grands honneurs mérités,
D’avoir triomphé par surprise
De la pudeur de dame Elise.
Maître Aeneas, votre bâtard,
Comme tout soudrille est vantard,
En fera des contes pour rire :
Vous faites état d’en médire,
Et les choses iront ainsi ?
Ah ! vraiment, attendez-vous-y !
Vous vous êtes mis en la tête
Que notre chien n’est qu’une bête !