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Page:Scarron - Le Virgile travesti, 1889.djvu/500

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Elle acheva de déconfire
Turnus, le très valeureux sire :
Il en pissa de peur au lit,
Et voici ce qu’elle lui dit,
Reprenant ses mêmes paroles :
"Regarde, tête des plus folles,
Si mon menton est fort barbu,
Et si mon sexe est ambigu.
Je ne suis barbon ni barbue,
Et mon oeil n’a point la berlue,
Et je ne sais rien controuver,
Et n’ai point de vin à cuver,
Et je ne suis point ivrognesse,
Et si tu découvres ma fesse,
Tes cent claques sur mon cul sec
Ne m’apprendront point le respect.
Je n’ai point puante l’haleine ;
Mais je suis ta fièvre quartaine,
Qui te puisse casser le cou,
Grand paresseux, grand fat, grand fou !
Je suis Alecton l’infernale,
Et non pas cette martingale
Dont j’avais la forme et l’habit.
Je t’apporte ici dans ton lit
Gale, famine, guerre et peste,
Et la mort, que chacun déteste."
Et puis, ce qui passait le jeu,
Lui fit au nez un rot de feu,
Ensuite une laide grimace,
Lui mettant face contre face.
Auprès de ce rot infernal,
Coups de canon de l’Arsenal
Sont coups d’arquebuse rouillée,
Dont la poudre est moite ou mouillée.
Pour ce long discours d’ennemi,
Turnus n’avait pas dédormi ;
Bien est-il vrai que le pauvre homme
N’avait pas dormi de bon somme,
Mais ce rot d’enfer, rude et chaud,
Le fit réveiller en sursaut,