Aller au contenu

Page:Scarron - Le Virgile travesti, 1889.djvu/83

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Qu’ils fissent une haquenée
(Si vous voulez, cheval de pas,
Lequel des deux n’importe pas).
Par ce prodigieux ouvrage,
Ida perdit tout son ombrage ;
Tous ses sapins prirent le saut,
Ou, pour le moins, bien peu s’en faut.
Pallas même y prit la cognée,
Pour faire de l’embesognée,
Aussi fut ce maître dada
Aussi grand que le mont Ida.
Je ne sais comment diable ils firent :
Dans ce grand cheval ils bâtirent
Toutes sortes de logements,
Sans oublier des aisements ;
Puis, de munitions et d’armes,
Et de leurs plus hardis gendarmes,
Tous altérés de notre sang,
Ils emplirent le vaste flanc
De cette bête à large échine.
Que maudite soit la machine,
Et le vilain qui l’inventa,
Et la femme qui l’allaita,
Et le mari de cette femme,
Et toute sa famille infâme ;
Et, pour n’en faire à tant de fois,
Les Grégeoises et les Grégeois !
Ayant donc fait ce grand colosse,
Cette prodigieuse rosse,
Qu’ils disaient, pour couvrir leur jeu,
Etre une offrande ou bien un vœu
Pour leur prompt retour dans la Grèce,
Qui diable eût deviné la pièce,
Et que ses larges intestins
Eussent des soldats clandestins,
Et tant de belle infanterie,
Ou bien plutôt cavalerie,
Puisqu’ils étaient tous à cheval ?
Nous crûmes donc ce bruit fatal,
Et que l’ennemi faisait gille,