Page:Scarron - Oeuvres T3, Jean-François Bastien 1786.djvu/312

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plus obéissant, s’échappe sous un mauvais écuyer et le porte par terre. Une femme résistera à telle et à telle tentation de mal faire, et fera une faute de la dernière importance, lorsqu’elle se croira le mieux sur ses gardes. Une faute en attire souvent plusieurs, et la distance qui est entre la vertu et le vice, n’est quelquefois que le chemin de peu de jours. Et à quoi sont bonnes toutes ces vérités morales, dira ici quelqu’un ? Et de quoi se tourmente-t-il ? qu’il s’en serve ou qu’il les laisse, selon qu’il en aura besoin, et qu’il en sache au-moins bon gré à qui les donne pour rien. Dom-Sanche étoit donc prêt à se lever d’auprès de sa jeune femme, quand le maître-d’hôtel de son oncle lui apporta un billet de sa part par lequel il l’informoit de la dame étrangère, qu’il croyoit l’avoir excroqué, parce quelle ne paraissoit en pas une des hôtelleries de Tolède où il l’avoit fait chercher, et le prioit par le même billet de lui donner un de ses gens, pour le faire aller après cette friponne sur le chemin de Madrid, où il croyoit qu’elle pouvoit être allée, parce qu’il avoit mis du monde sur tous les grands-chemins qui conduisoient de Tolède aux villes voisines, excepté sur le chemin de Madrid. Dom-Sanche n’étoit pas endurant, il se sentoit attaqué pat la partie la plus foible de son ame, et étoit tout fier d’être une fois accusé faussement d’une foiblesse, lui qui avoit été convaincu de plusieurs. L’argent volé et la fourbe faite à son oncle, l’irritoient également. II conta l’affaire à sa femme et à quelques-uns de ses parens qui l’étoient venu voir le lendemain de ses noces ; et sans pouvoit être détourné de ce qu’il avoit envie de faire ni par les priéres de sa femme, ni par les avis de ses amis, il s’habilla à la hâte,