Page:Scarron - Oeuvres Tome 7 - 1786.djvu/180

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Ou qui n’oit pas quelqu’accident notable,
Qu’il n’en conte un de soi presque semblable ;
Un putréfait qui vous vient approcher ;
Des inconnus qui vous nomment, mon cher ;
L’admirateur qui sur tout se récrie ;
Un importun qui tous les jours vous prie
D’aller chez lui prendre un méchant repas,
Et le fait tel qu’on n’y retourne pas ;
Les indiscrets qui sans licence viennent
Se mettre en tiers à deux qui s’entretiennent :
Tous ces gens-là devroient être chassés
Hors de l’enclos des murs bien policés.
N’oublions pas l’ignorant qui décide ;
Ni le franc fat, qui par un front qu’il ride,
Et que toujours il ride sans sujet,
Donne à penser qu’il fait un grand projet ;
Ni le rêveur, qui quoi qu’on lui propose,
Quoi qu’on lui dise, ou rêve à quelque chose,
Ou sans songer que vous l’entretenez,
En entretient un autre à votre nez ;
Ni le gaillard qui de tout rit et raille,
Goguenardant sur tout, vaille que vaille.
Ajoutons-y tous les mauvais plaisans,
Tant campagnards, bourgeois, que courtisans,
À qui l’on dit, faites-nous un bon conte.
Pour ceux de qui la repartie est prompte,
Admirateurs des bons-mots anciens,
Des Grecs, Romains, Lacédémoniens,
Ils sont fâcheux de la même maniére,
Qu’un picoteur ou rompeur en visiére.
Les grands seigneurs qui prônent leurs exploits,
Leur grand crédit, leurs importans emplois,
Et qui par-tout font comme un manifeste
De leur haut rang, qu’aucun ne leur conteste,
Ont en cela quelque chose de bas :
Leur grand mérite ici fait un faux pas,
Et l’on a vu plus d’un grand personnage
S’être rendu fâcheux par ce langage.
Tout incivil, ou civil par excès ;
Ceux qui toujours parlent de leurs procès,
De leurs amours, affaires et querelles ;
Ceux qui toujours débitent des nouvelles,
Sans qu’on les ait priés d’en débiter ;
Et ceux aussi qui ne font que pester,