CHAPITRE VI.
MARIAGES.
Le degré de moralisation auquel des hommes esclaves peuvent atteindre, est en rapport exact avec les faits extérieurs qui ont été décrits dans les chapitres précédens. Il n’existe presqu’aucune union légitime parmi les nègres. Des habitations de deux cent-cinquante et trois cents individus, n’en comptent pas une seule. Dans les notices statistiques officielles déjà citées, il est dit que la proportion des mariages d’esclaves, relativement à leur population, est pour la Guadeloupe de un sur six mille huit cent quatre-vingt, et pour la Martinique, de un sur cinq mille cinq cent soixante dix-sept !
Nous croyons avoir prouvé dans un autre ouvrage[1] que le mariage est incompatible avec la servitude. L’esclave mâle ou femelle, au milieu de la vie animale qu’on lui a faite, au sein de la profonde obscurité intellectuelle et morale où on le laisse plongé, ne conçoit guère l’association matrimoniale, et encore moins conçoit-il, avec ses ardentes passions sensuelles que rien ne réprime, la pénible obligation de la fidélité. Le nègre prend une femme avec laquelle il vit maritalement, et dont il accepte les enfans pour siens, mais il veut se conserver la faculté de séparation, comme J.-J.-Rousseau, et cela ne l’em-
- ↑ Abolition de l’esclavage, 1839