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Page:Schanne - Souvenirs de Schaunard, 1892.djvu/200

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LES SOUVENIRS DE SCHAUNARD

amis qui ont l’air de le croire !.. Ah ! mais non, mais non !

Puis des chapelets d’injures à n’en plus finir et des menaces de gifles ou de griffades pour le soir en rentrant au logis. Cependant l’ouragan ne durait guère qu’un quart d’heure, et se résolvait en quelques fredons insouciants et blagueurs.

La liaison du nommé Alexandre S*** et de Louisette (dite Phémie-Teinturière) dura assez longtemps et sans qu’il soit besoin d’en noter d’autre incident que celui de la rupture.

Un soir d’automne, le nommé Alexandre S***, rentrant à Paris après une tournée en Bretagne, trouva Louisette qui l’attendait chez lui, et d’autant plus correctement, que la pauvre fille venait d’être malade pendant plusieurs semaines. Les économies de monsieur s’épuisèrent vite en notes de pharmacien, ainsi qu’en viandes et vins réconfortants.

La convalescence dura près de trois mois. Comme l'année finissait, la petite malade, entièrement remise, voulut profiter du jour de l’an pour faire sa première sortie ; mais elle n’avait aucune garde-robe d’hiver, et il fallait, coûte que coûte, lui en procurer une. C’est alors que le nommé Alexandre S*** se résigna à vendre son paletot neuf, comptant qu’une double chemise lui en donnerait la chaleur au même degré, et ayant ainsi réalisé trente francs il les dépensa à nipper Louisette.