Page:Schelling - Écrits philosophiques, 1847, trad. Bénard.djvu/494

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parce qu’il est principalement le monde des formes, et ainsi la partie plastique du poëme. On doit reconnaître, dans le purgatoire, la partie pittoresque. Non-seulement les expiations qui sont imposées aux pécheurs sont, en partie, représentées tout-à-fait dans le genre de la peinture, avec un calme qui va jusqu’à la sérénité ; mais, en particulier, le voyage sur la colline sacrée des expiations présente une rapide succession de figures, de scènes, où sont épuisés tous les effets variés de la lumière. Lorsque le poète est arrivé sur les bords du Léthé, alors se déploie la plus haute magnificence de peintures et de couleurs, dans la description des antiques bois sacrés de cette contrée, de la clarté céleste des eaux recouvertes de leurs ombrages éternels, de la jeune fille qu’il rencontre sur ces rives, et de l’arrivée de Béatrice au milieu d’un nuage de fleurs, sous un voile blanc, couronnée d’olivier, portant un manteau vert et vêtue d’une robe dont la couleur avait l’éclat d’une flamme vive.

Le poète est lancé par le cœur de la terre elle-même dans la région de la lumière. Dans l’obscurité du monde souterrain, on ne pouvait distinguer que la forme des objets. Dans le purgatoire, la lumière s’alimente encore, en quelque sorte, de la matière terrestre, et devient la couleur. Dans le paradis, il ne reste plus que la pure musique de la lumière. Celle-ci cesse d’être la lumière réfléchie, et le poète s’élève, par degrés, à la contemplation de la pure