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LITTÉRATURE CONTEMPORAINE

de 1791 ; il y a cinq ans que madame Roland n’a revu sa ville natale, mais avec quelle ardeur n’a-t-elle pas suivi les événements qui s’y sont accomplis ! Je me la figure courant tout d’abord aux séances de l’Assemblée et des clubs. Nos époux patriotes étaient déjà depuis longtemps en correspondance avec Brissot ; ils firent sa con^ naissance personnelle, celle de Pétion, de Robespierre. Bientôt on se groupa autour d’eux ; quelques-uns des principaux membres de la gauche se réunissaient dans leur salon, le soir, quatre fois par semaine. Madame Roland a laissé de piquants portraits de ses hôtes. Buzot y figure déjà. C’est l’homme vertueux par excellence, « le caractère de la probité même revêtue des formes douces de la sensibilité. » Brissot est franc, simple, négligé, un mélange de gravité philosophique et de légèreté, de dévouement et de duperie ; il ne connaît point les hommes, manque de la force nécessaire pour haïr ; il n’a, du reste, pas plus de honte de la pauvreté que de crainte de la mort. Quant à Robespierre, Madame Roland le goûtait assez alors ; son langage était mauvais et son débit ennuyeux ; il était horriblement poltron et se tirait de ses lâchetés par des gambades. On le voit ricanant, se mangeant les ongles, demandant ce que c’est qu’une république. Mais c’était un homme pur, et on lui pardonnait a en faveur des principes. » M. Faugère a publié une lettre que madame Roland écrivit à Robespierre quelques jours après avoir quitté Paris, et qui témoigne de relations assez étroites, puisqu’elle lui parle de son mari, de son enfant, de ses travaux, de la campagne. Le