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Il faut obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes, — c’est ce qu’implique la simple croyance en Dieu. Mais il y a une distinction entre l’injustice et l’immoralité d’une loi, et l’immoralité seule peut devenir pour la conscience un motif de résistance. Enfin, dans le cas même de résistance à une loi immorale, le citoyen doit se soumettre volontairement à la clause pénale, parce que celle-ci n’est qu’injuste. On le voit, ici la discussion s’élargit ; mais elle est partout remarquable par les ressources de la logique et par la vigueur du style.

Au fond, dans cette crise de l’intolérance vaudoise, en 1829, comme dans la recrudescence de 1845, il y a eu deux idées en présence, celles que nous avons déjà indiquées, celles dont Vinet proclama plus tard les tendances et l’antagonisme absolu : d’un côté, la négation de Dieu au profit de l’humanité, et de l’individu au profit de l’espèce ; de l’autre, la doctrine qui, mettant Dieu au-dessus de l’homme et regardant la conscience morale comme l’organe de Dieu dans l’homme, investit la conscience d’une autorité vraiment suprême. En 1829, Vinet n’a pas encore donné au système de ses adversaires le nom dont il le revêtira quinze ans après, celui de socialisme ; or, comme il le dit lui-même, « il n’est pas indifférent pour un système, pour une idée, d’être enfin nommé, après avoir longtemps existé sans nom. » Mais ce qui préoccupe Vinet à l’époque dont il s’agit, et ce qui lui suffit pour le moment, c’est l’idée sacrée de la conscience. Il a compris que, dans sa discussion avec le Conseil d’État, tout revient