Page:Schiff - Marie de Gournay.djvu/45

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être ce dévouement naïvement intéressé frappe-t-il plus chez elle à cause de la longueur démesurée de sa vie qui lui permit d’espérer des secours de tant de souverains, de glorifier tant de reines, d’aduler tant de ministres. Elle vécut en un temps de tempêtes et de luttes acharnées où les règnes duraient peu ; née sous Charles IX, elle est morte sous Louis XIV. Ses dédicaces nous font connaître ses protecteurs officiels et ses protecteurs officieux : Marie de Médicis, le maréchal de Bassompierre, Anne d’Autriche, Richelieu s’occupent d’elle pour lui servir des pensions ou pour l’aider à les obtenir.

Comme poète, Marie de Gournay a mis en vers français plusieurs livres de Virgile, elle a encore traduit Ovide, Salluste et Tacite[1]. Comme éditeur,

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  1. De plus, Marie de Gournay a fait une version en vers du Veni Creator, de l’Ave maris stelka, du cantique de Zacharie, du Magnificat et du Te Deum. Elle a traduit aussi une scène de l’Infanticide, tragédie latine de Daniel Heinsius. C’est peut-être à cette dernière traduction que Marie doit les éloges que lui décerne Nicolas Heinsius, fils de Daniel, dans son Liber Elegiarum, louanges qui ont si fort blessé la vanité de l’irascible Balzac. Dans une lettre à Chapelain datée du 13 avril 1646, il dit : « Je me suis veu dans son livre (le livre de Heinsius) auprès de Mr nostre gouverneur, et pas loin de nostre amy, qua societate mirum in modum gloriamur ut praeclaris illis laudibus. Mais ma vanité a esté un peu mortifiée quand j’ay veu la demoiselle de Gournay aussi bien ou mieux traittée que moy, et, à vous dire le vray, je ne tire pas beaucoup d’avantage de cette seconde société. » Lettres de Jean-Louis Guez de Balzac, publiées par M. Philippe Tamizey de Larroque (Paris, 1873), lettre CXXXVIII.