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ANNALES DU MUSÉE GUIMET

« Om Vadjrapâni houm »  ; d’autres fois le nom est omis, comme dans la célèbre prière à six syllabes : « Om mani padme houm », Ô joyau dans le Lotus, Amen. Cette prière est une invocation à Pâdmapāni (v. p. 56), à qui est attribuée sa révélation aux Tibétains ; c’est la plus usitée de toutes, et par cette raison elle a excité la curiosité des premiers visiteurs du Tibet. Son véritable sens fut longtemps douteux, c’est seulement par les plus récentes recherches qu’on a pu le déterminer d’une façon positive[1]. On sait que le Lotus (Nymphoæ Nehimba, Linné) est le symbole de la suprême perfection ; il rappelle dans ce cas la genèse de Pâdmapāni, qui est issu de cette fleur. Chaque syllabe de la prière possède un pouvoir magique spécial[2] ; peut-être que cette croyance a aidé à sa vulgarisation plus encore que l’origine divine qu’on lui prête.

Dans nos planches cette prière porte le no XIV ; c’est une impression d’après un bloc de bois original. Dans un cylindre à prières[3] que j’eus occasion d’ouvrir, je trouvai cette sentence imprimée en six lignes et répétée un nombre de fois incalculable sur une feuille de 49 pieds de long sur 4 pouces de large. Quand le baron Schilling de Cannstadt fit sa visite au temple Souboulin en Sibérie, les Lamas étaient occupés à préparer 100 millions de copies de cette prière pour les mettre dans un cylindre. Ils acceptèrent avec empressement l’offre d’en faire exécuter le nombre nécessaire à Saint-Pétersbourg et en retour de 150 millions de copies qu’il leur adressa, il reçut une édition du Kandjour qui comprend près de 40,000 feuillets.

Quand les lettres de cette sentence ornent le commencement des livres religieux, ou sont gravées sur les revêtements des murs à prières[4], elles sont souvent combinées en forme d’anagramme. Les lignes longitudinales qui se trouvent dans les lettres « mani padme houm » sont tracées serrées les unes contre les autres et, à gauche, sont appendues à la ligne longitudinale

  1. Voyez Klaproth, Fragments bouddhiques, p. 27 ; Schmidt, Mémoire de l’Académie de Saint-Pétersbourg, vol. I, p. 112 ; Foe Koue Ki, traduction anglaise, p. 116 ; Hodgson, Illustration, p. 171 ; Schott, Ueber den Buddhaismus, p. 9 ; Hoffman, Beschreibung von Nippon, vol. V, p. 175.
  2. Schmidt, Forschungen, p. 200 ; Pallas, Mongol. Völkerschaften, vol. II, p. 90. La puissance de chaque sentence ou de chaque livre augmente si l’écriture en est rouge, argent ou or. L’encre rouge par exemple ajuste 108 fois plus de pouvoir que la noire. Schilling de Candstadt, Bul. hist. phil. de Saint-Pétersbourg, vol. IV, p. 331, 333.
  3. Pour plus amples renseignements sur cet instrument, voyez le chapitre suivant.
  4. Voyez à propos de ces murs, chap. xii.