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LE BOUDDHISME AU TIBET

sans désir point de sensation (agréable ou pénible) ; la sensation supprimée, plus d’attachement aux objets existants ; par là, plus de reproduction d’existence ; celle-ci entraîne la suppression de la naissance ; sans naissance plus de décrépitude, ni de mort.

Ainsi s’éteint le corps complet des maux[1].

2° Nous trouvons dans les livres d’instruction appartenant à ce système une accumulation considérable de préceptes et de règles dont le but est de dégager les fidèles des liens qui les attachent à l’état présent et futur de l’existence et de fortifier en eux les vertus morales. Le trait dominant partout est curieux et digne de remarque ; le caractère général qui se dégage de tous ces principes (compris dans deux cent cinquante articles) est négatif ; ainsi la charité est recommandée non par l’ordre de donne)-, mais par la défense de prendre, excepté quand le don est une aumône.

Déjà cette école avance cette doctrine, que la perfection dans la méditation abstraite est indispensable pour le salut final ; cette perfection est la preuve d’une énergie qui ne découle pas de la pure pratique des simples vertus. Néanmoins cette idée ne va pas jusqu’à assigner à la spéculation mentale une plus grande valeur qu’aux vertus.

Dans certaines circonstances pourtant, l’assiduité dans une réflexion sans distraction devient une tâche des plus difficiles ; aussi certains exercices préparatoires sont-ils recommandés pour conduire l’esprit à l’abstraction complète des objets extérieurs (mondains). Mais ici nous trouvons dans le bouddhisme de parfaites extravagances dans l’ordre des considérations morales. Compter les inspirations et les exhalaisons du souffle est selon lui un excellent moyen d’obtenir la tranquillité de l’esprit.

« L’horreur du monde, dit-il, découle des méditations sur les attributs du corps ; si donc on commence par considérer son corps comme une pourriture, on se convaincra qu’il ne contient rien que misère et décrépitude, et il sera alors facile de dépouiller toute affection pour lui ; on finira même par considérer la nourriture comme étant aussi un amas de putréfaction absolument dégoûtante[2]. »

  1. Hardy, Manual of Buddhism, p. 391 ; Burnouf, le Lotus de la bonne Loi, appendice n° VI ; Introduction, p. 623. Foe-Koue-Ki, p. 291.
  2. Ce fanatisme moral ne paraît pas, cependant, découler exclusivement du bouddhisme. car les boud-