Page:Schlegel - Œuvres écrites en français, t. 1, éd. Böcking, 1846.djvu/350

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d’empires florissants, détruit tant de cités magnifiques, Rome elle-même ne put se soustraire.

L’étude des antiquités exige indispensablement des détails arides et minutieux, mais elle peut et doit se diriger vers de grands résultats. Elle nous rapproche des peuples anciens, elle anime leur histoire et leur littérature, ou y supplée en quelque façon, en nous faisant connaître les ouvrages de leurs mains, les objets de leur culte, leur costume et même leur physionomie. Cette étude ne laisse pas que d’avoir un côté propre a frapper l’imagination et affecter l’âme. Les hommes de tout temps ont mis une grande importance a transmettre leur mémoire à la postérité ; rarement ils y ont réussi. Ils pensaient ériger des monuments pour l’éternité : le temps les a brisés, ou, s’il en reste quelque chose, il les mine de jour en jour. Dissiper les ténèbres de l’oubli dont ces monuments sont enveloppés, c’est rendre un culte aux mânes des nations éteintes. Quelques pierres éparses, des inscriptions à demi effacées en caractères étranges, des grottes souterraines creusées pour receler les cendres des morts, d’abord excitent la curiosité, ensuite font naître des réflexions mélancoliques. Les sculptures de beaucoup d’urnes étrusques, suggérées par la piété conjugale ou filiale, nous peignent l’inévitable douleur des derniers adieux, le deuil des survivants, l’espoir d’une vie à venir. Ces images nous rendent visibles, pour ainsi dire, des sentiments éprouvés il y a deux mille ans. Aujourd’hui l’habitant du même sol, attaché par les mêmes liens à sa frêle existence. ignore ses devanciers qui adoraient d’autres dieux, suivaient d’autres lois, et parlaient une langue inconnue. Mais