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Page:Schleiermacher - Discours sur la religion, trad. Rouge, 1944.djvu/292

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gion, mais des façons différentes de penser l’Univers comme individu en même temps qu’on le contemple intuitivement dans le fini ; en effet, une de ces façons lui attribue une conscience particulière et propre ; et l’autre pas. Tous les éléments particuliers de la religion restent tout aussi indéterminés par rapport à leur situation respective et aucune des nombreuses façons de voir de la religion ne se trouve réalisée du fait que l’une ou l’autre de ces pensées l’accompagne[1]. Vous pouvez vous en rendre compte partout où quelque chose doit être présenté à la fois sous une forme religieuse et sous une forme purement déiste ; vous trouverez là que toutes les intuitions, tous les sentiments, et en particulier ce qui est le point autour duquel tout tourne ordinairement dans cette sphère les vues intuitives portant sur les mouvements de l’humanité dans le particulier, et sur l’unité dans ce qui dépasse le plan de sa libre volonté, ces vues, en ce qui concerne leurs rapports réciproques, flottent dans une indétermination et une ambiguïté complètes. Elles ne sont donc également toutes deux que des formes plus générales, dont le domaine doit d’abord recevoir, pour en être rempli, les formes individuelles et déterminées ; et si même vous limitez ce domaine en reliant ces dernières une à une avec une des trois espèces de la contemplation intuitive[2], ces formes composées de divers [259] principes de division du tout ne seront toujours que des subdivisions particulières et fermées, ce ne seront nullement des touts absolument déterminés et formés. Ainsi donc ni le naturalisme — par où j’entends l’intuition de l’Univers contemplé dans sa pluralité élémentaire, sans représentation de conscience et volonté personnelles des divers éléments particuliers, — ni le panthéisme, ni le polythéisme, ni le déisme, ne sont des religions particulières et déterminées telles que nous les cherchons. Ce ne sont que des espèces, dans le domaine desquelles beaucoup d’individus proprement dits se sont déjà développés, et un plus grand nombre encore

  1. Application de la différence profonde statuée par l’auteur entre la religion, intuition et sentiment de l’Infini, et la philosophie, effort pour connaître et comprendre cet Infini.
  2. Cf. p. 255, 257.