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qu’il s’applique à l’égocentrisme ; nous voyons apparaître aussi les mots « éloignement de l’Univers, irréligion, mal ». Le mot péché, Sünde, n’est pas prononcé, du moins dans ces pages, et c’est pourtant la notion dont Fr. Schlegel saura reconnaître l’année suivante, en 1800, dans son Idée no 63, qu’elle est, comme cela a été si souvent proclamé « la notion centrale du christianisme ». J’ai cherché plus haut à déterminer les causes et les effets de cette indulgente modération de l’éthique de Schleiermacher.

Quoi qu’il en soit, au lieu de poser le problème du Christ Rédempteur et d’en donner sa solution, comme il le fera plus tard, le théologien se plaît ici à soutenir que le Médiateur par excellence n’a jamais prétendu être le Médiateur unique, p. 304, pas plus qu’entendu codifier définitivement toute la religion. L’idée de médiation est si centrale dans le christianisme, déclare-t-il, que l’histoire de cette religion est en partie celle de témoignages qui ont complété l’œuvre et le message du Christ : ceux des apôtres, des saintes Écritures entre autres. Ces dernières sont devenues Bible par leur propre force, mais n’interdisent à aucun autre livre d’être aussi Bible, ou de le devenir, et ce qui serait écrit avec une force égale à la leur, elles se le laisseraient volontiers adjoindre (page 305). Nous avons eu à citer ce texte en résumant sa pensée sur les Écritures saintes en général. La suite montre qu’à son avis, ce qui s’est produit dans le passé se produira encore dans l’avenir et peut se produire dans le présent.

Le principe d’une religion positive est immortel. Celui du christianisme est toujours vivant. Des reviviscences, alternant avec les inévitables décadences, assurent sa palingénésie (page 309). Que l’intuition et l’adoration de l’Univers (1806 : de la Divinité) se produisent de toutes manières. La religion peut revêtir des corps innombrables, dit le texte de 1799, multiples, atténue à peine celui de 1806. « Rien n’est moins religieux que d’exiger l’uniformité des humains, rien n’est moins chrétien que de chercher l’uniformité dans la religion » (page 310).

En terminant, le théologien protestant invite ses amis à adorer, dans la communion des saints, qui est ouverte à toutes les religions, et dans laquelle seule chacune de celles-ci peut s’épanouir, « le Dieu qui sera en eux », page 312. Tel