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Page:Schlick - Gesammelte Aufsätze (1926 - 1936), 1938.djvu/255

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mais nous n’avons pas le temps de nous livrer à la critique. Il suffit de rappeler que, selon Kant lui-même, l’existence de jugements synthétiques a priori doit paraître tout à fait incroyable à un esprit dépourvu de préjugés. Néanmoins, il pensait que l’existence réelle de tels jugements dans les sciences et les mathématiques ne pouvait être niée ; ces disciplines semblaient être pleines de propositions — telles que le principe de causalité et les axiomes d’Euclide — dont la validité absolue ne pouvait être sérieusement mise en doute : Kant se croyait donc confronté à la question : « Ces propositions incroyables se rencontrent dans la plus stricte des sciences — comment diable sont-elles possibles ? ».

Comment expliquer que nous ayons des connaissances, nécessairement et absolument valables, sur des faits dont nous n’avons aucune expérience ? Comment pouvons-nous être sûrs qu’un événement, qui se produit demain ou dans cent ans, aura une cause ? ou que sept objets et cinq objets, lorsqu’ils sont comptés sur une étoile lointaine et inconnue, formeront ensemble douze objets ? — Vous savez que toute la Critique de la raison pure est consacrée à la solution de ce problème. Mais hélas ! ce problème n’existe pas, car il n’y a pas de jugements synthétiques a priori, ni en sciences naturelles, ni en mathématiques, ni ailleurs. Il faut excuser Kant de n’avoir pas reconnu la vraie nature de la géométrie, car à son époque il était presque impossible de se rendre compte que la géométrie, dans la mesure où elle traite des propriétés de l’espace, est une science physique dont les propositions sont empiriques et non a priori ; et que dans la mesure où elle est a priori, elle n’est rien d’autre qu’un système hypothético-déductif, consistant uniquement en fonctions propositionnelles, et par conséquent n’affirmant rien du tout au sujet de quelque fait que ce soit. Il faut peut-être aussi pardonner à Kant d’avoir cru, même après la critique de Hume, à la validité absolue du principe de causalité, bien que l’attitude de la physique moderne à l’égard de ce principe prouve que cette croyance est très loin d’être même une nécessité psychologique ; mais il est extrêmement difficile de justifier l’opinion de Kant concernant la nature de la forme arithmétique. Sa tentative de prouver que est un jugement synthétique semble très superficielle et faible, surtout si l’on considère le traitement du sujet par Leibniz, et c’est l’un des passages les plus pauvres de toute son œuvre. Bien qu’il y ait encore aujourd’hui un désaccord considérable sur le fondement ultime des mathématiques, personne ne peut plus penser que les « propositions arithmétiques » communiquent une quelconque connaissance du monde réel. Elles sont certes a priori, mais leur validité