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place beaucoup trop considérable, et même la formule magique de six lettres, vidyâ chadakchari (1), la dhârani par excellence, y est tout spécialement recommandée par le Buddha en personne. Quoi d’étonnant alors que le Grand-Véhicule ait conduit aux élucubrations d’une imagination sans frein ni limites de la prajnâpâramita, la perfection de la sagesse, du saddharmapundarika, le lotus de la loi excellente, et de bien d’autres vaîpulyas (2) de cet acabit. C’est ainsi que le monde buddhique revint, en les surpassant, par des exagérations doctrinales inimaginables déposées dans un fatras de volumes qui comptent par centaines de mille (3), à toutes les vieilles superstitions dravidiennes, mongoliques ou anariennes, et qu’il finit par se déconsidérer et par se perdre dans des pratiques qui dépassent en ineptie et en folie encore celles du çivaïsme, le drâvidisme brahmanisé. C’est particulièrement parce qu’on s’éprit de la passion de vouloir exploiter la nature et de l’aveugle croyance de pouvoir lui dérober ses secrets par la sorcellerie des diagrammes et d’autres combinaisons toutes aussi insensées, passion et croyance que le quatrième concile consacra en plaçant les tantras qui enseignent spécialement comment, en se livrant à la matière, on peut s’en rendre indépendant, en plaçant, dis-je, les tantras parmi les livres canoniques, que l’intelligence des buddhistes et avec elle leur caractère martial s’afïàiblirent si foncièrement que leurs adversaires, quoique théologues et théosophes déterminés, mais cependant prudents dans l’usage des excitants spirituels, grâce aux soins qu’exigeaient

(1) Om mani padmê hûm. (V. Schœbel, le Buddha et le buddhisme, p. 81).

(2) Les Vaîpulyas ou amplifications du dharma ainsi que les Vydkaranas ou légendes sur les buddhas antérieurs à Çâkya, et les Udânas ou prédications ne font pas partie des ouvrages du petit véhicule. Voyez d’ailleurs la description et l’examen comparatif de tous ces traités chez Burnouf, Introd. à l’hist. du Buddhisme, p. 53, sqq, n. 102, sqq.

(3) Voy. Fausboll, Dhammap., préf. p. 3, où l’on trouve rassemblées à sujet des indications prises chez Cosma Korosi, Turnour, Hardy, Pàllegoix. Voir aussi Hodgson, Asiatic. Res XVI, 421.