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Page:Schoebel - Le Mythe de la femme et du serpent.djvu/18

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trop loin ici, dans un ouvrage que nous publierons sous le titre de Philosophie de la critique. Disons seulement que nos explications ne toucheront pas à ce qui est ineffable. Accessible à l’intellect, l’être en soi demeure caché à la compréhension. On ne saurait donc pas même lui attribuer un nom. « Je ne sais pas son nom, disait déjà Lao-tseu ; personne ne peut le nommer ; il ne peut être nommé. Le nom qui peut être nommé n’est pas le nom éternel. Il n’a pas de nom[1] ». En effet, un nom est une définition, et on ne définit pas l’inconnu et l’inconnaissable. Pour définir Dieu, il faudrait l’être soi-même ; l’amour, quelque puissant qu’il soit, n’y suffit pas. Une légende frisonne raconte que le dieu Ekke promit un jour la liberté à son amante si elle pouvait lui dire son vrai nom divin[2]. Jamais elle n’y parvint. Mais Goethe avait raison : « Qui ose le nommer ? et qui ose dire : Je crois en lui ? Qui peut sentir et se permettre de dire : Je ne crois pas en lui » ?

  1. Tao te king, XXV, 6, XLI, 14 ; XIV, 6, I, 1, XXXII, 1, tr. Julien.
  2. Hansen, Sagen und Erzählungen der Sylter Friesen, p. vii.