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père, accorde à ta fille de rester toujours vierge[1] ! » Diane voulut même n’avoir d’autres compagnes que soixante filles ayant cet âge où, en Grèce, comme nous l’avons dit tout à l’heure, elles ne portaient point encore de ceinture.

On comprend donc que les Béotiens aient pu ériger à une vierge des autels sur lesquels, dit Plutarque[2], « les époux qui n’étaient que fiancés lui faisaient des sacrifices. » Il est vrai que ces mêmes Béotiens firent bâtir aussi un temple à la Vénus de Lamia, cette courtisane publique qui fut la maîtresse de Démétrius Poliorcète[3]. Il y avait, on le voit, compensation. Néanmoins, pour tout mettre à sa place, on doit reconnaître que la faveur dont jouissaient chez les Grecs les courtisanes tenait bien plus à la violence morale que nous font la grâce et la beauté, et, par suite, au tempérament esthétique de ce peuple, qu’à l’absence du sentiment des convenances et de la décence, c’est-à-dire au manque de sentiments de pudeur. Au contraire, les Athéniens, sur ce point, étaient d’une extrême délicatesse. Ainsi, pour n’en citer qu’un exemple, lors d’une recherche domiciliaire chez tous les orateurs qu’on soupçonnait d’avoir reçu des présents, le peuple d’Athènes respecta la maison de Calliclès, parce que, nouvellement marié, la jeune épouse était dans sa maison : νύμφης ἔνδον οὔσης[4]. Si donc, malgré ces traits d’une exquise pudeur,

  1. Δός μοι παρθενίην αἰώνιον, ἄππα, φυλάσσειν. (Callim., Hymne à Diane, 6.)
  2. Plut., Aristide, XXXV.
  3. Alciphron, Lettre Ire ; Athénée, l. VI. — Les Béotiens étaient d’ailleurs particulièrement adonnés au culte de Priape. (Pausanias, Beotica, IX, c.31.)
  4. Theopompe, ap. Plut., Demosthenes, XXV.