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le plus prononcé de la pauvre humanité. Dès lors on peut admettre a priori que ce commerce aura été, à l’origine, accompagné de circonstances propres à en vicier le caractère naturel et à le dénaturer en quelque sorte. Serait-ce une pure et vaine hypothèse ? Mais si vraiment elle l’était, nous ne concevrions absolument pas comment un acte légitime et nécessaire pourrait être entaché d’une invincible honte ; comment le mariage, qui passe cependant pour être un sacrement, pourrait être « honteux dans son usage » ; comment nous pourrions éprouver au sujet de cet usage le tourment de la pudeur, marterndes Gefühl der Scham, pourquoi enfin « on ne doit point dire à de chastes oreilles ce dont de chastes cœurs ne sauraient se passer[1] ».

Toutefois c’est à étudier, et je ne vois pas que jusqu’ici il y ait un document qui convienne mieux à la base de cette étude que le texte des chapitres ii et iii de la Genèse mosaïque. C’est la légende biblique de la chute qui se répète, à ce qu’il semble, comme un écho polyphème plus ou moins distinct chez tous les peuples sémitiques et indo-européens, sans que nous sachions jusqu’ici où l’auteur de la Genèse l’a recueillie.

Cependant, avant d’entrer au cœur de notre sujet, rappelons la sentence déjà citée des stoïciens que « le sage doit parler librement », et armons-nous, si l’esprit de science, pour qui tout est pur, n’y suffisait déjà, de la vertu des vestales ou des matrones romaines qui, soutenues par des motifs de l’ordre le plus élevé, approchaient

  1. Man darf das nicht vor keuschen Ohren nennen,
    Was keusche Herzen nicht entbehren können.

    (Faust, p. 131, éd. 1847.)