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privilégiée, le paradis. Pendant trois cents ans, il règne dans une félicité inaltérable, et la mort est inconnue aux créatures[1]. Mais voilà que l’orgueil envahit le cœur de ce roi trop heureux, et il dit : « Je ne reconnais dans le monde que moi… Il faut reconnaître en moi le créateur du monde ».

Cependant Iblis, c’est-à-dire Ahriman, avait tenté l’ambitieux Zohak, fils du roi d’Arabie, et lui avait dit : « Pourquoi y aurait-il un autre maître que toi ? À quoi bon un père quand il y a un fils comme toi ?… Prends son trône, c’est à toi que doit appartenir sa place… »

Zohak se mit à rêver. Il dit au tentateur : « Cela ne se peut pas, conseille-moi autre chose ». Iblis lui répondit, l’enveloppa dans ses filets, et l’amena à se décider à lui obéir. Le roi avait un jardin qui réjouissait son cœur. Le div l’y fit tomber dans un piége, et le roi périt. Alors Iblis prépare pour Zohak un mets de sa composition et le lui fait manger. Dès ce moment, celui-ci s’abandonne entièrement au démon et lui permet de le baiser, de l’embrasser. Et soudain un serpent noir sort de chaque épaule de Zohak, et le criminel devient « l’homme à la face de serpent ». Voilà qui explique le nom de Zohak qui est une contraction arabe de l’irânien Aji dahâka, « le serpent qui blesse ».

  1. Rappelons à ce sujet le mythe grec rapporté par Hésiode (Opera et Dies, v. 170 sqq.) sur le séjour où règnent les lois de Saturne :

    Là coulent des héros les paisibles journées
    Dans les riants bosquets des îles fortunées,
    Où l’arbre, trois fois l’an, se couronne de fleurs
    Et prodigue ses fruits aux plus douces saveurs.

    (Tr. Salmon.)