Page:Schopenhauer - Écrivains et Style, 1905, trad. Dietrich.djvu/192

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et de la plausibilité de l’erreur ; mais ce temps aussi s’écoulera, et dans beaucoup de cas il serait inutile de vouloir le devancer. Au pis aller, il en ira de la théorie comme de la pratique, où la fraude et la tromperie, enhardies par le succès, sont toujours poussées plus loin, jusqu’à ce qu’on finisse presque inévitablement par les découvrir. Ainsi, en théorie également, l’absurdité, grâce à la confiance aveugle des imbéciles, gagne toujours plus de terrain, jusqu’à ce que ses dimensions énormes forcent les yeux des plus bêtes à la voir. Il convient donc de dire au sujet de ces choses-là : plus insensées elles sont, et mieux elles valent.

On peut aussi trouver un réconfort dans le souvenir de toutes les sornettes et marottes qui ont déjà eu leur temps, puis ont complètement disparu. Il y en a de telles en matière de style, de grammaire et d’orthographe, qui durent trois ou quatre ans. Pour les plus importantes, on déplorera la brièveté de la vie humaine ; on fera toutefois bien de rester en arrière de son temps, si l’on constate que ce temps suit une voie rétrograde. Car il y a deux façons de ne pas être « au niveau de son temps » : c’est d’être au-dessous, ou au-dessus.