Page:Schopenhauer - Éthique, Droit et Politique, 1909, trad. Dietrich.djvu/132

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sité semblable dans les espèces animales ? même chez les individus des races animales supérieures ? La méchanceté de la race féline, développée le plus fortement chez le tigre ? La malice perfide du singe ? La bonté, la fidélité, l’amour du chien ? de l’éléphant ? etc. Le principe de la méchanceté est manifestement le même chez l’animal que chez l’homme.

Nous pouvons atténuer un peu la difficulté du problème, en remarquant que toute cette diversité ne concerne finalement que le degré, et que les inclinations fondamentales, les instincts fondamentaux existent au complet dans tout être vivant, mais seulement à un degré et en rapports très différents. Cela toutefois ne suffit pas.

Comme explication, il nous reste seulement l’intellect et son rapport avec la volonté. L’intellect, toutefois, n’est nullement en rapport direct avec la bonté du caractère. Nous pouvons, il est vrai, dans l’intellect même, distinguer de nouveau l’intelligence comme conception de rapports d’après le principe de la raison, et la connaissance apparentée au génie, indépendante de cette loi, le principium individuationis, pénétrante, plus directe, qui conçoit aussi les idées : c’est celle qui se rapporte au moral. Mais l’explication à ce sujet laisse aussi beaucoup encore à désirer. « Les beaux esprits sont rarement de belles âmes », a remarqué justement Jean-Paul ; ils ne sont jamais non plus l’inverse. Bacon de Vérulam, qui fut moins, il est vrai, un bel esprit qu’un grand esprit, était un coquin.

J’ai allégué comme principium individuationis le temps et l’espace, vu que la multiplicité des choses homogènes n’est possible que par eux. Mais la multi-