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INTRODUCTION

familles, jusqu’à ce que nous arrivions à la notion suprême qui comprend tout. Cette loi étant transcendantale, et essentielle à notre raison, présuppose sa concordance avec la nature ; c’est ce qu’exprime cet ancien précepte : « Entia prêter necessitatem non esse midtiplicanda. » [Les êtres ne doivent pas être multipliés à moins que ce ne soit nécessaire] — Par contre, Kant énonce ainsi la loi de la spécification : « Entium varietates non temere esse minuendas. » [On ne doit pas réduire sans raison les espèces différentes d’êtres] Celle-ci exige que nous séparions scrupuleusement les genres groupés dans la vaste notion de famille, de même que les espèces supérieures et inférieures, comprises dans ces genres ; elle nous impose d’éviter avec soin les sauts brusques et surtout de ne pas faire entrer directement quelque espèce dernière, et à plus forte raison quelque individu, dans la notion de famille ; car toute notion est susceptible d’être encore subdivisée en notions inférieures, et aucune ne descend jusqu’à l’intuition pure. Kant enseigne que ces deux lois sont des principes transcendants de la raison et qu’elles réclament à priori l’accord avec les choses : Platon semble énoncer, à sa façon, la même proposition quand il dit que ces règles auxquelles toute science doit son origine nous ont été jetées par les dieux du haut de leur siège, en même temps que le feu de Prométhée.

§ 2. — Son application dans le cas présent.

Malgré d’aussi puissantes recommandations, la seconde de ces lois a été, selon moi, trop peu appliquée à un principe fondamental de toute connaissance, au principe