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OBSERVATIONS GÉNÉRALES ET RÉSULTATS

d’exemples où les mots cause et raison sont confondus et employés indistinctement l’un pour l’autre, ou bien où l’on parle en général d’une raison et de ce qui est fondé sur une raison, d’un principe et de ce qui découle d’un principe, d’une condition et d’un conditionné, sans préciser davantage, justement peut-être parce que l’on se rend compte, dans son for intérieur, de l’emploi non justifié que l’on fait de ces notions. C’est ainsi que Kant lui-même parle de la chose en soi comme de la raison du phénomène. Ainsi encore, dans la Critique de la raison pure. (5e éd. allem., p. 590), il parle d’une raison de la possibilité de tout phénomène, d’une raison intelligible des phénomènes, d’une cause intelligible, d’une raison inconnue de la possibilité de la série sensible en général (ibid., p. 592), d’un objet transcendantal qui est la raison des phénomènes, de la raison pour laquelle la sensibilité est soumise à telles conditions plutôt qu’à toutes les autres conditions suprêmes, et ainsi de suite dans bien d’autres passages encore. Tout cela me semble mal s’accorder avec cette pensée si importante, si profonde, je puis dire immortelle (ibid., p. 591) : que l’accidence[1] des choses n’est elle-même que phénomène et ne peut nous conduire à aucune autre régression qu’à la régression empirique qui détermine les phénomènes.

Tous ceux qui connaissent les ouvrages philosophiques modernes savent combien, depuis Kant, les concepts de

  1. C’est l’accidence empirique qui est entendue, et qui signifie pour Kant la dépendance de quelques autre chose ; je renvoie du reste pour cette question au blâme contenu dans ma Critique de la philosophie kantienne, 2e édit. allem., p. 521. (Note de Schop.)