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v. morale et religion

à des commandements divins. Mais c’est précisément le rôle de la philosophie, ici comme ailleurs, de chercher à expliquer les faits par leurs raisons profondes et véritables, sans se fonder sur autre chose que sur la nature humaine, sans recourir à aucune sorte d’interprétation mythique, de dogme religieux, de postulat transcendant, et en exigeant toujours la confirmation de l’expérience extérieure ou intérieure.

En présence d’une bonne action dont l’auteur se réclame de certains dogmes, il faut donc toujours savoir distinguer entre deux possibilités et se demander si ces dogmes sont réellement le motif déterminant, ou seulement, comme j’ai déjà dit, l’explication fictive par quoi l’individu cherche à satisfaire sa propre raison à propos d’une action qui dérive en réalité d’une toute autre source ; je veux dire une action qu’il accomplit parce qu’il est un homme de bien, mais dont il est incapable de trouver les vraies raisons, parce qu’il n’est pas un philosophe, tout préoccupé qu’il est de savoir ce qu’il en faut penser. La distinction est d’ailleurs fort difficile à établir, car les éléments à distinguer se dissimulent dans les profondeurs du sentiment. C’est pourquoi il nous est presque toujours impos-