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MÉMOIRES SUR LES SCIENCES OCCULTES

des taches toutes dues au hasard le plus aveugle. Et cependant il y a lieu de conjecturer que ce qui est pour nous, au sens le plus haut et le plus vrai du mot, le juste et l’utile ne peut pas réellement être ce qui était simplement projeté, réalisé jamais, donc ce qui n’a jamais reçu d’autre existence que dans notre pensée — les vani disegni, che non han’ mai loco de l’Arioste — et donc que, une fois que le hasard l’a fait échouer, nous aurions à regretter notre vie durant ; mais que bien plutôt ce que nous trouvons réellement empreint dans la grande image de la réalité, et dont nous disons, une fois que nous en avons reconnu l’utilité, avec conviction sic erat in fatis, c’est cela qui a dû arriver ; que conséquemment donc, il faut que de quelque manière il soit pourvu à la réalisation de l’utile, entendu en ce sens du mot, par l’unité, existante au fin fond des choses, de l’accidentel et du nécessaire. Grâce à cette unité, dans le cours de la vie humaine, la nécessité intérieure qui se présente comme une poussée de l’instinct, la pensée réfléchie et raisonnable, finalement l’action extérieure des circonstances, réagissant l’une sur l’autre, travaillent à l’envie pour faire qu’à la fin de l’existence, quand tout est fini, la vie se dé-