De telles communications m’intéressent psychologiquement, elles élargissent mon point de vue et la connaissance du monde et des hommes. Elles confirment ma conception, que j’ai déjà plusieurs fois répétée : notre société vit sur l’apparence, et il y a deux morales, une morale devant les hommes et une morale entre quatre yeux.
En effet, quelle expérience n’avais-je pas, malgré ma jeunesse ! D’abord, mon père, sévère et digne, et ma mère vertueuse : je les avais surpris au moment de l’ivresse des sens, au moment du triomphe de la volupté. Ensuite, Marguerite : quoique vive et animée, elle parlait toujours des convenances et des bonnes mœurs, elle sermonnait perpétuellement ma jeune cousine, et quels aveux n’avait-elle pas confiés à ma jeune oreille, et n’avais-je pas vu de mes propres yeux comment elle apaisait ce qui la consumait en se procurant l’illusion de ses désirs ! Enfin, ma tante, l’exemple le plus complet d’une vieille fille prude et sèche ! Et Roudolphine, cette élégante jeune femme, qui se donnait à un homme parce que la joie du lit conjugal lui était trop parcimonieusement distribuée, selon son goût ! Et le prince, cet homme extérieurement froid et diplomatique, une nature complètement disciplinée, quelle vigueur sensuelle ne vivait pas en lui ! Et ces personnes ne jouissaient-elles pas, dans leur cercle, du renom de la plus haute moralité ? Oui, j’avais raison : le monde se base sur l’apparence.
Maintenant que j’avais atteint mon but, que j’étais