que dans mégot, doublet de mèchego. M. F. Bonnardot nous a suggéré le rapprochement du nom propre Ménégaud. La finale aurait pris une autre forme orthographique comme dans nigaud (ni-got) pour nyais (cf. Villon) mot employé au xve et au xvie siècle dans le sens de nigaud. À la simple inspection du verbe ligotter, nous avons supposé *ligot pour lien. Ce mot, hypothétique a priori, existe dans le vocabulaire de Pechon de Ruby avec le sens spécial de jarretières ; lien a donné à la même époque un autre doublet argotique : c’est lyettes (les aiguillettes). Gogo (rire, boire à gogo) s’interprète par gosier[1]. Enfin on peut hasarder une explication du mot « argot » fondée sur la même méthode. Elle a sur les explications les plus récentes l’avantage d’être appuyée sur une méthode. Comme l’a reconnu M. Vitu (Jargon du xve siècle), le terme argot s’est appliqué à la confrérie des gueux avant de désigner leur langage. « Qu’aucun mion ne soit passé du serment qu’au préalable il n’ait esté reconnu affectionner l’argot ni estre frolleux », (Jargon de l’argot réformé). Or la cour des Miracles était divisée en quatre sections : Égypte, Boëme, Argot, Galilée. Le rapprochement de ces noms de pays orientaux suggère l’explication d’Argot par Arabie. Le mot n’est pas autrement fait que Saint-Lago par Saint-Lazare[2] ou †Italgo pour Italien. De l’adjectif arabe arby nos zouaves ont fait Arbico.
La considération des suffixes argotiques nous a amenés à une correction dans le texte de Villon. Aujourd’hui on dit †loimique (moi), †loitrique ou †loitrème (toi), etc. Vidocq (1837) donne mèzigue, sézigue, mézigo, etc. Cartouche dit : Vouziergue trouvaille bonorgue ce gigotmuche (Vous trouvez bon ce gigot). De ces faits se dégage l’observation que le pronom personnel en argot a été revêtu d’un suffixe. Dans l’édition de la fin du xviiie siècle du Jargon de l’argot réformé, réimprimée par Techener, on trouve : mezière (moi), nozière (nous), seizière, sezingand (lui), tezière, tezingand (toi), vouzailles, vozières (vous). L’édition Jacques Oudot (Troyes, composée vers 1629) donne les mêmes formes. Le vocabulaire de Pechon de Ruby (1596) contient les formations : luy-mesmes ses lis (pour ses iis), moy-mesmes (meziis), toy-mesmes (tezis), nous (nozis).
Parmi les modifications signalées par Ol. Chéreau se trouve
- ↑ Cf. boire à plein guogo (Rabel. Pantagruel) et les doublets gogaille et goguette. Dans une étude sur le mot go on pourra montrer la relation sémantique qui existe entre gogo (gosier) et gogo (jobard).
- ↑ On voit qu’avec certains suffixes, go par exemple, le mot est tronqué. Il n’est pas nécessaire de supposer toujours que cette défiguration est un résultat de l’influence du suffixe. L’argot défigure souvent les mots par l’abréviation. Ex. : achar (acharnement), autor (autorité), bénef (bénéfice), comme (commerce), dauffe (dauphin), es (escroc), †diam (diamant), †magne (manière), †pardesse (pardessus), †condice (condition), †occase (occasion), etc.