Page:Schwob - Cœur double, Ollendorff, 1891.djvu/282

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Le Loup (Schwob)


L’homme et la femme, qui traînaient leurs pieds sur la route des Sables, s’arrêtèrent en écoutant des coups espacés et sourds. Ils avaient été poursuivis par les deux mâtins de Tournebride, et le cœur leur sautait dans le ventre. À gauche, une ligne sanglante coupait la bruyère, avec des bosses noires de place en place. Ils s’assirent dans le fossé ; l’homme rapetassa ses brodequins troués avec du fil poissé ; la femme gratta les plaques blanches de terre poussiéreuse qui écaillaient ses mollets. Le gars était « moelleux, » poignes solides, des nœuds aux bras ; l’autre tirait sur la quarantaine, une « gerce de rempart. » Mais des yeux luisants et mouillés, la peau encore assez fraîche, malgré le hâle.

Il grommela en se rechaussant : « On croûte encore des briques, à ce soir. C’est pas saignant que tous