Page:Schwob - Mœurs des diurnales, 1903.djvu/85

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et des grands crus, que le vin nouveau faisait (sauf le respect de Notre Maître) ch—r doux et mou sous tous les quinquets, j’étais, tel que vous me voyez, rapin servant à l’atelier du baron Gros. La peinture en ce temps-là menait à tout. Car nous avions le culte de la ligne. De la ligne aux lignes ; de la croûte au canard : c’est la devise de ma vie. Faites un bon contour, nous disait Ingres, et (en tout bien tout honneur, Notre Maître) ch—z dedans. Je portais la belle cravate, faite d’un torchon à palette, et la culotte de peau (de zébi, dit le spirituel Douilloche). Justement, reprit Brandebran. Vous savez, les jeunets, ce qu’étaient les rapins servants. Il fallait mêler les couleurs, cirer les bottes, acheter la tranche de Brie, éplucher les saucissons (est-ce une allusion ? cria Cervelas) — et, acheva Brandebran, passer le balai dans la cambuse. L’hiver, on avait froid aux doigts, et les anciens vous bouchaient le feu. Enfin c’était dur. Nous avons bien ri tout de même. (On rit toujours, dit Notre Maître). Voilà qu’un jour le loustic de chez nous (n’était-ce pas Delaroche ?) apporte, avec tous les égards qui lui sont dus, un superbe étron (Messieurs, saluez), fait de carton-pâte. Nous le mettons sur la planche