Page:Schwob - Vies imaginaires, 1896.djvu/121

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

leur était forte : les frères avaient grand’soif et grand’faim. Ils entrèrent dans une cour qu’ils ne connaissaient point, et Dolcino s’écria de surprise en déposant son panier. Car cette cour était tapissée de vignes feuillues et toute pleine de verdeur délectable et transparente ; des léopards y bondissaient avec beaucoup d’animaux d’outre-mer, et on y voyait assis des jeunes filles et des jeunes gens vêtus d’étoffes brillantes qui jouaient paisiblement sur des vielles et des cithares. Là le calme était profond, l’ombre épaisse et odorante. Tous écoutaient en silence ceux qui chantaient, et le chant était d’un mode extraordinaire. Les frères ne dirent rien ; leur faim et leur soif se trouva satisfaite ; ils n’osèrent rien demander. À grand’peine, ils se décidèrent à sortir ; mais sur la rive du fleuve, en se retournant, ils ne virent point d’ouverture dans la muraille. Ils crurent que c’était une vision de nécro-