Page:Schwob - Vies imaginaires, 1896.djvu/126

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d’une croix et l’emmena. Les porchers et les vachers les considéraient sur la lisière des champs. Beaucoup quittèrent leurs bêtes et vinrent à eux. Des femmes prisonnières que les hommes de Crémone avaient cruellement mutilées en leur coupant le nez, les implorèrent et les suivirent. Elles avaient le visage enveloppé d’un linge blanc ; Margherita les instruisit. Ils s’établirent tous dans une montagne boisée, non loin de Novare, et pratiquèrent la vie commune. Dolcino n’établit ni règle ni ordre aucun, étant assuré que telle était la doctrine des apôtres, et que toutes choses devaient être en charité. Ceux qui voulaient se nourrissaient avec les baies des arbres ; d’autres mendiaient dans les villages ; d’autres volaient du bétail. La vie de Dolcino et de Margherita fut libre sous le ciel. Mais les gens de Novare ne voulurent point le comprendre. Les paysans se plaignaient des vols et du scandale.