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“SCIENTIA„

approfondir l’expérience et la science, comme si elle craignait s’éloigner de son but. Ce qui sollicite l’esprit spéculatif de notre penseur, c’est moins le résultat que la méthode et, plus que la méthode, le mode d’expression du problème et la façon dont il est posé. C est pourquoi Vailati reste dans le domaine classique de la philosophie, en donnant à celle-ci sa signification la plus restreinte.

Certes, la philosophie de Vailati n’est pas toute la philosophie ; la définition même de sa pensée implique la conception d’une limite naturelle, je dirais intensive, qui laisse à sa pensée elle- même la plus grande liberté d’extension.

Mais qu’elle est la philosophie pouvant aspirer à une universalité de possession ? A l’ampleur de cadres vides et de formules verbales sans signification, aux vastes programmes pleins de larges promesses qui ne seront jamais tenues, bref, à l’illusion de la grande philosophie qui séduit de nos jours trop d’esprits, nous préférons beaucoup la critique même fragmentaire et unilatérale d’un penseur en apparence plus modeste, qui possède en quelque sorte l’organisme de pensée dont d’autres font un vain étalage.

A l’heure où les formules vieillies du romantisme, privées du contenu poétique et affectif qui les animait, reviennent et obscurcissent les esprits, la Logique claire de Giovanni Vailati reste un avertissement et un exemple pour la jeunesse italienne. Et le problème qu’il a posé (et dont il a peut-être exagéré l’importance, en ce qui concerne certaines doctrines scientifiques), apparaît vraiment essentiel pour le diagnostic de la maladie qui travaille la littérature philosophique contemporaine. La façon dont il avait poursuivi le développement de sa pensée, liant toujours l’histoire de la philosophie à l’histoire de la science, témoigne, d’un autre côté, du sérieux de sa vie de travail et oppose une réponse éloquente à ceux qui prétendent faire œuvre philosophique, tout en ignorant la science, ou qui croient qu’il suffit de lui témoigner le respect qu’elle mérite, pour être dispensé, je ne dirai pas d’en apprendre les résultats, mais de soumettre sa propre intelligence à une discipline scientifique.

Bologna, Università.

Federigo Enriques