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LES PROGRÈS DE LA CULTURE DES FLEURS ETC.

étranges, et c’est là cependant que se trouve la partie dont la foule comprend le moins la signification.

Ce qui frappe tout d’abord celui qui examine des Orchidées, c’est la bizarrerie de ces plantes ; leur port grêle, leurs feuillage charnu et épais, leurs racines aériennes, leurs tiges bulbeuses s’opposant à l’éclat incomparable de leurs corolles. Chacun éprouve encore un peu les sensations décrites si bien par de Puydt[1] qu’éprouvaient les visiteurs de serres d’Orchidées, à F époque lontaine déjà où ces plantes ont commencé à paraître en grand nombre en Europe: « On pénétrait dans les serres d’Orchidées, dit-il, avec une ardente curiosité, comme dans quelque sanctuaire où se serait accompli un mystère tangible. Cette culture sans terre, ces racines aériennes, cette atmosphère lourde, vaporeuse, ces feuillages anormaux, ces allures étranges vous saisissaient tout d’abord, et, si quelque fleurs s’y épanouissait avec ses formes originales, ses pétales charnus, ses couleurs sombres et son parfum pénétrant, ou demeurait surpris, émerveillé surtout du spectacle et de la patience du cultivateur ».

Ce qui étonnait tellement autrefois dans la culture des Orchidées découlait d’une particularité alors peu connue de ces plantes, c’est qu’elles sont des filles de l’air ou autrement des plantes épiphytes. Nous connaissons très peu en Europe les plantes de cette catégorie, car ce ne sont pas les quelques Lichens et Mousses poussant sur les arbres qui peuvent nous en donner une idée. Dans les contrées chaudes du globe, ce mode d’existence est, au contraire, très répandu et, depuis un grand nombre de siècles, les graines de certaines espèces, appartenant parfois à des familles presque entières comme les Orchidées ou les Broméliacées, ont dû résoudre victorieusement le problème délicat d’existence qui se pose à un organisme devant vivre et croître sur une branche, exposé à l’ardeur des rayons du soleil qui tend à le dessécher, en grand danger de mourir d’inanition par suite de l’absence d’aliments à sa portée. Cette vie épiphyte a attiré l’attention d’Osbeck qui récoltait en Asie et en Malaisie des plantes pour Linné au XVIIIe siècle; il lui envoya un grand nombre de types curieux qui furent tous

  1. De Puydt, Les Orchidées, p. 16.