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et des dimensions de leurs orbites.

Par une pensée intuitive comme il en manifestera souvent, Paul Langevin postule, pour ce calcul, la stabilité des orbites électroniques, ce qui se trouvera confirmé par la théorie de Bohr quelques années plus tard. Et la formule de la constante diamagnétique ne sera pas modifiée non plus par l'introduction ultérieure de la notion de spin qui ne correspond pour l'électron à aucun effet d'induction supplémentaire. Dans certaines substances dont les édifices moléculaires ont un moment résultant non nul, l'effet diamagnétique, toujours très faible, est masqué par le phénomène plus intense du paramagnétisme. Pour rendre compte de cette propriété, Paul Langevin introduit un mode de raisonnement nouveau, qui se montrera particulièrement fécond. Quand les molécules, mobiles sous l'effet désordonné de l'agitation thermique, sont placées dans un champ magnétique, il s'établit un équilibre entre les deux effets antagonistes, et l'action orientante du champ est d'autant plus marquée que la température est plus basse. Cette théorie a suscité un nombre considérable de travaux dans des domaines très divers. C'est par l'orientation moléculaire que Debye a pu ultérieurement, en admettant les molécules porteuses d'un moment électrique, établir la théorie des diélectriques d'où ont découlé de grands progrès dans la connaissance de la structure des molécules. Paul Langevin a pu lui-même interpréter de la même manière la biréfringence électrique découverte expérimentalement par Kerr, et la biréfringence magnétique découverte par Cotton et Mouton. Si sa théorie ne rend pas compte du ferromagnétisme, il a cependant ouvert la voie aux travaux de Pierre Weiss sur ce sujet, en suggérant qu'il faudrait, pour l'interpréter, tenir compte des actions intermoléculaires. L'une des conséquences les plus importantes de ce bel édifice théorique est la réalisation de très basses températures par le procédé de désaimantation adiabatique d'une substance paramagnétique. La théorie prévoit que cet effet doit être d'autant plus important que le champ magnétisant était plus intense et la température initiale plus basse. La réalisation, fort délicate, a pu être menée à bien par De Haas qui, en 1925, a obtenu une température de 0,25 degrés Kelvin. La même méthode permet aujourd'hui d'atteindre 0,001 degrés Kelvin. Il est inutile de souligner l'importance essentielle qu'a prise, dans de très nombreux domaines de la recherche fondamentale moderne, la réalisation des T.B.T.[1]. Le vaste exposé d'ensemble sur La physique des électrons — qui ouvre l'unique recueil de conférences scientifiques publié par Paul Langevin sous le titre La physique depuis vingt ans (Doin, Paris, 1923) — ne peut guère être détaillé ici, mais nous devons en indiquer les grandes lignes afin de faire mieux apprécier combien cette mise au point s'est révélée riche de conséquences, tant dans l'acheminement

  1. Les développements de la théorie du magnétisme de Langevin ont notamment donné lieu en novembre 1948 à un colloque international qui s'est tenu au Collège de France à l'occasion du transfert au Panthéon.