Page:Scott - Ivanhoé, trad. Dumas, 1874.djvu/227

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vives et les plus cuisantes à l’endroit de son fils ; car la nature avait maintenu ses droits, en dépit du stoïcisme patriotique qui s’efforçait de la méconnaître.

Mais il n’eut pas plutôt appris qu’Ivanhoé se trouvait entre des mains compatissantes et probablement amies, que l’inquiétude paternelle, éveillée par le doute sur le sort de son fils, fit place de nouveau au sentiment de l’orgueil et de la colère, blessé de ce qu’il appelait la désobéissance filiale de Wilfrid.

— Qu’il suive sa route, dit-il ; que ceux-là guérissent les blessures auxquelles il s’est exposé. Il s’entend mieux à faire les tours de jongleur de la chevalerie normande, qu’à soutenir la renommée et l’honneur de ses ancêtres anglais avec le glaive et la hache, ces bonnes vieilles armes de son pays.

— Si, pour soutenir l’honneur de ses ancêtres, dit lady Rowena, qui était présente, il suffit d’être sage dans le conseil et brave dans l’exécution, d’être le plus hardi parmi les hardis et le plus doux parmi les doux, je ne connais d’autre voix que celle de son père qui lui refuse ces qualités.

— Silence sur ce sujet, lady Rowena ! je ne vous écoute pas, dit Cédric ; préparez-vous pour le festin du prince, nous y avons été invités dans des circonstances honorables et avec une courtoisie inusitée, telle que les fiers Normands en ont rarement employé envers notre race depuis le fatal jour d’Hastings. Je veux y aller, ne fût-ce que pour montrer à ces orgueilleux Normands combien peu le sort d’un fils qui a pu vaincre les plus braves d’entre eux sait toucher un cœur saxon.

— Et moi, dit lady Rowena, je n’irai pas là ; craignez, croyez-moi, que ce que vous prenez pour du courage et de la fermeté ne soit imputé à de la dureté de cœur.

— Restez donc chez vous, dame ingrate, répondit Cédric ; c’est votre cœur qui est dur, puisqu’il sacrifie le bien-être d’un peuple opprimé à un vain attachement non légitimé.