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IVANHOÉ.

un regard expressif du précepteur de Templestowe les rendit à leur insensibilité bourrue, et ils déposèrent, avec une précision qui aurait paru suspecte à des juges plus impartiaux, des faits tout à fait faux ou au moins insignifiants et des plus naturels, mais qui se produisirent escortés du soupçon par la manière exagérée dont ils étaient racontés, et par les commentaires sinistres dont ils étaient accompagnés.

Les détails de leur déposition eussent été, de nos jours, divisés en deux classes, savoir : celle qui était insignifiante, et celle qui était physiquement impossible. Mais, dans ces temps d’ignorance et de superstition, ces accusations étaient facilement admises comme des preuves de culpabilité. On aurait rangé, dans la première, ce qu’ils dirent, qu’on entendait Rébecca se parler à elle-même dans une langue inconnue ; que les chansons qu’elle chantait parfois étaient d’une douceur singulière qui charmait les oreilles et faisait battre le cœur ; qu’en se parlant quelquefois à elle-même, elle semblait attendre une réponse ; que ses vêtements étaient d’une forme étrange et mystique, tout à fait différents de ceux que portaient les femmes honnêtes ; qu’elle avait des bagues où étaient gravées des devises cabalistiques, et que des caractères inconnus étaient brodés sur son voile.

Toutes ces circonstances, si simples et si insignifiantes, furent écoutées gravement et comme autant de preuves, ou du moins comme fournissant matière à de forts soupçons que Rébecca entretenait une correspondance illicite avec des êtres mystérieux.

Vint ensuite un témoignage non moins équivoque, que la crédulité du plus grand nombre des assistants recueillit avec avidité, tout incroyable qu’il était.

Un des soldats l’avait vue opérer une cure merveilleuse sur un homme blessé, qu’ils avaient conduit avec eux au château de Torquilston ; elle avait, dit-il, fait certains signes sur sa blessure en prononçant des mots mystérieux,