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LES PURITAINS D’ÉCOSSE

promptement terminée, et d’obtenir le rétablissement d’une paix qui, sans diminuer en rien les droits constitutionnels du roi, substituera la justice de la magistrature civile au despotisme militaire, permettra à chacun d’honorer Dieu suivant sa conscience.

« Avec de pareils sentiments, vous devez sentir combien il m’est pénible de me trouver en armes devant le château de votre respectable parente. On nous assure que vous avez l’intention de le défendre contre nous ; permettez-moi de vous représenter qu’une telle mesure ne conduirait qu’à une inutile effusion de sang. Vous n’avez pas eu le temps nécessaire pour faire des préparatifs suffisants de résistance ; et si nos troupes ne se rendent pas maîtresses de la place par un assaut, le défaut de vivres vous forcera bientôt à capituler. Dans l’un et l’autre cas, mon cœur saigne en songeant aux souffrances et aux malheurs auxquels ceux qui l’habitent seraient exposés.

« Ne supposez pas, mon respectable ami, que je voudrais vous voir accepter des conditions qui pourraient ternir la réputation sans tache que vous avez acquise et méritée. Faites sortir du château les soldats qui s’y trouvent, j’assurerai leur retraite, et j’obtiendrai qu’on n’exige de vous qu’une promesse de neutralité. Les domaines de lady Marguerite et les vôtres, seront respectés.

« Je pourrais vous alléguer bien d’autres motifs à l’appui de ma proposition ; mais dans la crainte où je suis de paraître coupable à vos yeux, je sens que, présentées par moi, les meilleures raisons perdraient leur influence. Je finis donc par vous assurer que, quels que puissent être vos sentiments à mon égard, la reconnaissance que je vous dois ne sortira jamais de mon cœur, et que le plus heureux instant de ma vie serait celui où je pourrais vous en convaincre autrement que par des paroles. Ainsi donc, quoiqu’il soit possible que vous rejetiez ces propositions, si les événements vous déterminaient par la suite à les accepter, n’hésitez pas à me le faire savoir, et croyez que je serai toujours heureux de pouvoir vous être de quelque utilité. — Henry Morton. »


Le major lut cette lettre avec indignation. — L’ingrat ! le traître ! s’écria-t-il en la remettant à lord Evandale. J’aurais dû ne pas oublier qu’il est presbytérien. Je devais songer que je caressais un jeune loup qui finirait par vouloir me déchirer.

— Je serai le dernier, dit lord Evandale, à proposer de rendre le château ; mais si nous venons à manquer de vivres, et que nous ne recevions pas de secours, je crois que nous pourrons profiter de cette ouverture pour assurer la sortie de nos dames.

— Elles souffriront toutes les extrémités plutôt que de rien devoir