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LES PURITAINS D’ÉCOSSE

même plus à se défendre. Au milieu du tumulte, la voix de Claverhouse se fit entendre. — Tue ! tue ! point de quartier ! s’écriait-il ; souvenez-vous de Richard Grahame ! — Les dragons, qui n’avaient pas oublié leur défaite à Loudon-Hill, n’avaient pas besoin d’être excités à la vengeance : ils n’eurent que la peine de massacrer des ennemis qui ne songeaient plus à se défendre.

Un corps de douze cents insurgés, qui se trouvait à l’aile gauche, jeta les armes à l’approche du duc de Monmouth, et se rendît. Ce seigneur, aussi humain que brave, leur accorda quartier ; et, voyant que partout la résistance avait cessé, il se mit à parcourir le champ de bataille afin d’arrêter le carnage. À l’aile droite il trouva Dalzell.

— Général, faites sonner la retraite ; assez de sang a coulé.

— J’obéis à Votre Grâce, dit Dalzell, mais je vous préviens que nous n’avons pas encore assez intimidé ces misérables rebelles. N’avez-vous pas appris que Basile Olifant, qui vient de lever une troupe, est en marche pour se joindre à eux ?

— Basile Olifant ? quel est cet homme ?

— Le dernier héritier mâle du feu comte de Torwood. Il est mécontent du gouvernement, parce que lady Marguerite Bellenden a été mise en possession de toute la succession de son père, à laquelle il prétendait avoir des droits. Il espère sans doute, à la faveur des troubles, pouvoir recouvrer ses biens par la force.

— Quels que puissent être ses motifs, il n’est plus à craindre. Cette armée est trop en désordre pour qu’il soit possible de la rallier.

Le général donna, d’un air de répugnance, l’ordre de sonner la retraite.

Mais le terrible et vindicatif Claverhouse était déjà trop loin pour entendre ce signal ; lancé à la poursuite des fuyards, il taillait en pièces tout ce qui ne pouvait se soustraire à sa rage.

Morton et Burley combattirent jusqu’à la dernière extrémité ; ils essayèrent de couvrir la retraite, et finirent par se voir abandonnés de presque tous ceux qui jusqu’alors avaient partagé leurs dangers. Une balle vint casser le bras droit de Burley,

— Puisse se flétrir la main qui a tiré ce coup ! s’écria-t-il en voyant tomber à son côté son glaive impuissant ; — je suis hors de combat[1].

À ces mots, il tourna bride.

Morton reconnut que tous ses efforts resteraient impuissants, et, ne voulant ni se sacrifier en pure perte, ni s’exposer à être fait

  1. Cet incident et l’exclamation de Burley sont historiques.