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LES PURITAINS D’ÉCOSSE

devant le tribunal de Dieu, pour répondre du sang innocent que tu as versé à flots.

Le moribond proféra ces paroles avec forces ; puis passant sa main droite sur son visage sanglant, il la leva au ciel, et ajouta : Jusques à quand, Seigneur, source de toute vérité, laisseras-tu sans vengeance le sang des saints ? — puis il se laissa tomber et expira avant que sa tête eût touché le sol.

Cette nouvelle scène ajouta encore à l’émotion de Morton, et il ne put s’empêcher d’être frappé de l’analogie singulière qui existait entre les dernières paroles de ce frénétique et les sentiments que venait d’exprimer Claverhouse.

Deux dragons qui se trouvaient dans la chambre, quelque endurcis qu’ils fussent, ne purent voir cette apparition inattendue et entendre l’espèce de prophétie dont elle fut accompagnée, sans ressentir un mouvement de crainte.

Claverhouse seul ne montra aucune émotion.

— Comment cet homme s’est-il trouvé là, dit-il au dragon qui était le plus près de lui, me répondrez-vous ? Que signifie cet air effaré ?

Le dragon répondit en bégayant qu’il fallait que ses camarades ne l’eussent pas aperçu quand ils avaient enlevé les trois autres cadavres.

— Eh bien, emportez-le donc maintenant, au lieu d’ouvrir de grands yeux et de rester les bras croisés. — Voilà du nouveau, monsieur Morton ; des morts qui ressuscitent pour venir nous faire des menaces ! Mais nous avons eu une terrible journée, et je crois que vous et moi, monsieur Morton, nous ne serons pas fâchés de prendre quelques heures de repos.

Il souhaita le bonsoir à Morton, et passa dans l’appartement qu’on lui avait préparé.

On conduisit Morton dans une autre chambre. Il remercia le ciel de l’avoir tiré du danger par les mains de ceux qui semblaient être ses plus dangereux ennemis.