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LE NAIN NOIR

attendiez n’ont pu aborder, et ont été obligés de repartir sans avoir pu débarquer aucune marchandise de leur cargaison. Leurs associés de l’ouest ont résolu de séparer leurs intérêts des leurs, les affaires de cette maison prenant une mauvaise tournure. J’espère que vous profiterez de cet avis pour prendre les précautions nécessaires à vos intérêts. Je suis votre très humble serviteur.

Nihil Mameless[1]

« À Ralph Maheschal de Mareschal-Wells. » (Très pressé.)

Sir Frédéric pâlit, et son front se rembrunit encore.

— Si la flotte française qui avait le roi à bord a été battue par celle d’Angleterre, comme ce maudit griffonnage semble le donner à entendre, le principal ressort de notre entreprise se trouve rompu, et nous n’avons pas même de secours à attendre de l’ouest de l’Écosse. Et où en sommes-nous donc ? s’écria Ellieslaw.

— Où nous en étions ce matin, je crois, dit Mareschal toujours riant.

— Pardonnez-moi, monsieur Mareschal. Ce matin nous n’étions pas encore compromis, nous ne nous étions pas déclarés publiquement, comme nous venons de le faire, grâce à votre inconséquence : et dans quel moment ? celui où vous aviez en poche une lettre qui ajoute aux difficultés de notre entreprise et en rend la réussite presque impossible.

— Oh ! je savais bien tout ce que vous alliez me dire ; mais d’abord cette lettre de mon ami anonyme peut ne pas contenir un mot de vérité ; ensuite, sachez que je suis las de me trouver dans une conspiration dont les chefs ne font tout le jour que former des projets qu’ils oublient la nuit. Aujourd’hui le gouvernement est dans la sécurité, il n’a ni troupes ni munitions, et dans quelques semaines il aura pris ses mesures. Le pays est plein d’ardeur pour une insurrection ; donnez-lui le temps de se refroidir, et nous resterons seuls. J’étais donc bien décidé à me jeter dans le fossé, et j’ai pris soin de vous y faire tomber avec moi. Vous voilà dans la fondrière ; il faudra bien maintenant que vous preniez le parti de vous évertuer pour en sortir.

— Vous vous êtes trompé, monsieur Mareschal, au moins quant à l’un de nous, répondit sir Frédéric, car je vais demander mes chevaux.

— Vous ne me quitterez pas, sir Frédéric, dit Ellieslaw ; nous avons notre revue demain matin.

— Je pars à l’instant même, et je vous écrirai mes intentions.

  1. Sans nom. Anonyme.