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piquillo alliaga.

votion, à ses ordres, qui, dès le lendemain du mariage, eût présenté sa femme à la cour ; mari d’autant plus commode que, docile, on le comblait de faveurs, et que, rebelle ou récalcitrant, on l’éloignait à l’instant même sans pouvoir être taxé d’arbitraire et sans tyrannie ; car, après la part active et prouvée qu’il avait prise à la conspiration de Lisbonne, l’exil était encore de la clémence.

Je dois vous écouter, à la demande de Monseigneur l’archevêque de Valence, pour refus de baptème.

Mais lui mort, Aïxa devenait bien plus libre encore qu’auparavant. Jeune fille, elle dépendait de la comtesse d’Altamira ; veuve, elle ne dépendait plus que d’elle-même.

Le duc, fidèle à ses promesses, lui avait fait remettre, le matin de son mariage, par frey Gaspard de Cordova, la lettre d’elle qu’il avait interceptée et qui pouvait compromettre tous les siens. Il n’avait donc plus aucun moyen de l’amener à la cour, comme il l’avait juré au roi son maître ; et le roi plus impatient et plus amoureux que jamais, lui répétait à chaque instant : Quel jour madame la duchesse de Santarem me sera-t-elle présentée ? Je ne veux que sa vue, sa présence… mais je la veux… vous me l’avez promise…

Il fallut bien alors annoncer au monarque que ce bonheur devait être encore différé, Aïxa ne pouvant être présentée à la cour par son mari, et apprendre à Sa Majesté le léger obstacle qui s’y opposait… la mort du duc de Santarem !

À cette nouvelle, à l’idée qu’il fallait attendre encore, le roi éprouva un tel dépit et se montra d’une telle humeur contre son ministre, que celui-ci comprit aisément que désormais sa faveur allait dépendre de l’exécution de sa promesse, et que toutes les questions se résumaient en une seule : Amener à tout prix Aïxa à la cour ; la décider, n’importe à quel titre, à y paraître ; sinon c’en était fait pour le duc de Lerma de son influence et de son pouvoir.

Il promit donc tout ce que désirait le monarque, et celui-ci retrouva sur-le-champ sa belle humeur et son sourire ; le beau temps était revenu. Mais pour qu’il fût durable, il s’agissait de contenter le roi, qui était