Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, cinquième partie, 1654.djvu/206

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meſnager : & vous n’enleverez jamais la Princeſſe, tant que Perinthe ſera vivant. Pendant que Mexaris amuſoit Perinthe à parler, il vit que quatre des ſiens s’avançoient vers le Chariot : de ſorte que ſans s’arreſter davantage, il attaqua Mexaris : apres luy avoir crié, qu’il luy ſeroit peut-eſtre plus aiſé de le vaincre, qu’il ne luy ſeroit facile à luy d’enlever Panthée tant qu’il vivroit. En effet, il l’attaqua avec tant de fierté, que Mexaris eut beſoin d’eſtre ſecouru parleſſiens, comme nous l’avons sçeu depuis, par les gens de la Princeſſe : car pour nous, Madame, nous eſtions tellement eſpouventées, que nous ne sçavions ce que nous voiyons. Pour moy, je sçay ſeulement que j’entendois un grand bruit : & que je voyois une confuſion eſtrange, parmy tous ces gens qui ſe battoient à quinze ou vint pas du Chariot de Panthée. Ce qu’il y eut d’avantageux pour nous fut que ceux à qui Mexaris avoit commandé de ſe ſaisir de la Princeſſe, durant qu’il combattoit, voyant leur Maiſtre ſi engagé dans un combat dont ils ne sçavoient pas l’evenement, quelque ineſgal qu’il fuſt par le nombre, ne le firent point : & ſe reſolurent d’attendre que la victoire leur fuſt un peu plus aſſurée ; ſe contentant d’empeſcher que les Chariots ne marchaſſent. Mais plus ils attendoient, plus ils voyoient leur party s’affoiblir : car Perinthe combatoit avec une valeur ſi extraordinaire, que j’ay oüy aſſurer qu’il tüa de ſa main plus de ſix des gens de Mexaris : l’ayant bleſſé luy meſme en plus d’un endroit. Ceux qui le ſecondoient, firent auſſi fort bien en cette occaſion : neantmoins comme des quinze hommes qu’il avoit, il y en avoit trois de lüez, & quatre hors de combat, il n’avoit preſques plus d’autre eſpoir. que celuy d’avoir la gloire de mourir en deffendant la Princeſſe : ſi