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Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, cinquième partie, 1654.djvu/273

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parlez du moins ingenûment, à un Prince qui ſeroit encore voſtre Amy ſi vous le vouliez. Ha Seigneur, s’eſcria le Roy de Pont, voſtre rigueur eſt trop grande ! de vouloir que je vous aprenne moy meſme, que vous eſtes auſſi bien avec la Princeſſe Mandane que j’y ſuis mal. Contentez vous que je vous aſſeure ſeulement, que ſi je ne la rends point, ce n’eſt pas que j’aye l’eſperance d’en eſtre aimé. Et qu’eſperez vous donc ? luy dit Cyrus ; mourir devant que vous la poſſediez, repliqua le Roy de Pont. Ce n’eſt pas le moyen de m’empeſcher de la poſſeder, reprit Cyrus, que de ne me vouloir pas combatre : je ne le veux auſſi que trop quelquefois, repliqua le Roy de Pont ; & il y a des inſtants, où quand je vous regarde comme mon Rival, & comme un Rival aimé, je ne me ſouviens plus de ce que je vous dois. Oubliez le pour touſjours, reprit Cyrus, puis qu’en vous en ſouvenant, vous ne rendez pas la Princeſſe que j’adore. Du moins, adjouſta encore ce Prince, faites que Creſus ne tire pas la guerre en longueur : & qu’il ſe reſolue promptement à donner une Bataille deciſive, qui faſſe pancher la victoire d’un Party ou d’autre. Je vous le promets, luy repliqua le Roy de Pont, bien faſché de ne pouvoir accorder davantage, non ſeulement à mon Liberateur, mais encore au Protecteur de la Princeſſe Araminte. Ne prenez point de part, repliqua Cyrus, au reſpect que je rends à cette illuſtre Perſonne, puis que je le fais, & pour l’amour d’elle, & pour l’amour de moy ſeulement. Apres cela, ces deux Princes ſe dirent encore pluſieurs choſes, où il y avoit tantoſt de la generoſité, & tantoſt de la colere : mais où il paroiſſoit touſjours de l’amour.

En fuitte dequoy eſtant preſts de ſe ſeparer,