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Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, cinquième partie, 1654.djvu/333

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charmé de voſtre vertu ; je pris le chemin qui me pouvoit conduire le plus ſeurement où je voulois aller. Mais le troiſiesme jour de mon voyage m’eſtant eſgaré, je me trouvay dans une grande Plaine, au milieu de la quelle je vy un petit Temple & une aſſez agreable Maiſon : comme il eſtoit deſja aſſez tard, je fis deſſein non ſeulement d’aller demander le chemin en ce lieu là, mais encore la grace d’y eſtre reçeu pour y paſſer la nuit : & en effet, j’y fus ſans deliberer davantage : & j’y fus reçeu avec autant d humanité que je l’avois attendu, & que je le pouvois deſirer. Le Sacrificateur me fit touteſfois quelque excuſe de ce que je ne ſerois pas auſſi commodement chez luy, que j’y euſſe pû eſtre en autre temps : me diſant que le peu de gens qu’il avoit, eſtoient ſi occupez aupres d’un Eſtranger qui eſtoit demeuré malade dan ſa Maiſon, & qui eſtoit à l’extremité, qu’il craignoit qu’ils ne puſſent pas me ſervit auſſi bien qu’il l’euſt ſouhaité. Comme il me parloit ainſi, on vint l’advertir que cét Eſtranger eſtoit plus mal, & qu’il demandoit â parler à luy, pour luy reveler un ſecret qui luy importoit extrémement : apres avoir entendu cela, je le ſupliay de ſatisfaire celuy qui l’envoyoit querir : neantmoins, ſans sçavoir bien preciſément pourquoy, je le voulus mener juſques à la porte de la Chambre de ce malade : mais Dieux, que je fus eſtrangement ſurpris, lors qu’eſtant preſt d’y laiſſer entrer ce Sacrificateur, je vy que celuy qu’il alloit viſiter eſtoit Tiburte, que je croyois avoir eſté noyé avec le Prince noſtre Maiſtre ! j’en fus ſi eſtonné, que je fus quelque temps ſans pouvoir meſme teſmoigner mon eſtonnement : mais apres m’eſtre un peu remis : j’entray dans la Chambre : & m’aprochant du lict de Tiburte, ma veuë ne le ſurprit