Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, cinquième partie, 1654.djvu/362

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de plus Beleſis avoit quantité de Pierreries que ſon Eſclaveavoit conſervées ſoigneusement, nous l’envoyaſmes avec mon cheval ; à la Ville la plus proche, en acheter encore un : & faire faire des habillemens pour mon Maiſtre & pour Beleſis. De ſorte que trois jours apres qu’il fut party, il revint avec une partie de tout ce qui eſtoit neceſſaire pour nôtre voyage, que nous commençaſmes d’une eſtrange ſorte. Car je remarquay que le Prince Mazare & Beleſis, ne quitterent leur Deſert, que comme des gens qui avoient deſſein d’y revenir : je ne fis pourtant pas ſemblant de m’en apercevoir : eſperant que le temps & le monde leur feroient changer d’avis. Cependant il falut qu’Arcas fuſt noſtre Guide, pour ſortir de la Montagne, dont il avoit fort bien retenu les détours : & en effet il nous en fit ſortir heureuſement. Pour moy, quoy que ce lieu là ſoit le plus beau du monde, j’eus bien de la joye de le quitter : & je ne tournay pas tant de fois la teſte pour le regarder comme fit Beleſis, qui tant qu’il pût voir cette Montagne, la regarda touſjours en ſouspirant. Mais comme il nous manquoit encore pluſieurs choſes pour nôtre voyage, nous fuſmes à la premiere Ville que nous rencontraſmes, où mon Maiſtre fit faire l’Eſcu qu’il a touſjours porté depuis : & qui vous à pû faire voir Seigneur (fi vous l’avez remarque) combien il ſe juge rigoureuſement luy meſme : puis qu’il ſe juge digne de mort pour avoir enlevé Mandane. Beleſis fit auſſi faire des Armes telles qu’il les vouloit : & durant que l’on travailloit pour cela, je fis ce que je pûs pour perſuader au Prince Mazare d’aller pluſtost vers le Roy ſon Pere que vers Mandane, à laquelle il advoüoit luy meſme ne pretendre plus rien. Mais il me dit qu’il ne quittoit ſon Deſert que pour la delivrer