Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, cinquième partie, 1654.djvu/450

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mort du feu Roy de la Suſiane. Apres avoir donc dit à ces deux querellans, tout ce que la civilité vouloit qu’ils leur diſſent, ils ſuplierent tout de nouveau Cyrus de vouloir les accommoder : & de les obliger à dire quel eſtoit leur different. Il eſt de telle nature, interrompit Beleſis, qu’il eſt impoſſible qu’il puiſſe jamais eſtre bien entendu, à moins que de sçavoir toute la vie d’Hermogene & toute la mienne : c’eſt pourquoy je penſe qu’il vaut mieux nous laiſſer Ennemis, que d’occuper ſi long temps tant de Grand Princes à entendre tant de choſes qui leur doivent eſtre indifferentes. L’intereſt des Perſonnes de voſtre merite, reſpondit Cyrus, ne doit jamais eſtre indifferent aux plus Grands Princes du Monde : c’eſt pourquoy s’il ne faut pour vous rendre juſtice qu’eſcouter le recit de toute voſtre vie, vous nous trouverez tous diſpoſez à l’entendre paiſiblement, Auſſi bien ne penſay-je pas que nous puiſſions plus utilement employer le loiſir que la Tréve nous donne, qu’à taſcher de vous rendre Amis Hermogene & vous : j’y trouveray meſme quelque avantage (adjouſta Cyrus en ſous-riant) puis que ſi je vous accommode, j’eſpere que vous en combatrez mieux le jour de la Bataille : c’eſt pourquoy je ſuplie tres humblement la Reine, de ſe ſervir du droit qu’elle a de commander à Hermogene ; & de luy ordonner da me dire vos avantures, ſi vous ne voulez pas que je les sçache par vous meſme. Hermogene, repliqua Beleſis, eſt trop intereſſé en la choſe, & a l’eſprit : trop adroit, pour m’obliger à ſouffrir que ſe ſoit ſur ſa narration que vous jugiez de la juſtice de ma cauſe, & de l’injuſtice de la ſienne : car Seigneur, comment ne vous preocuperoit il pas ; luy dis-je, qui m’a penſé perſuader à moy meſme plus de vint